Histoire de BD

planche_educateurs_ime_vignette.jpg

Gros plan

Loris P. et Laurent S., éducateurs spécialisés à l’IME Cerep-Phymentin animent depuis 2 ans un atelier création numérique impliquant de façon motivante les adolescents pris en charge. Mais pourquoi un tel projet ? Tout simplement pour répondre à la demande pressante de jeunes souhaitant travailler sur de nouveaux médias en recourant à des outils proches de leurs préoccupations.

Lors du bilan de fin d’année 2014, il nous est apparu nécessaire de revoir le contenu de l’atelier création afin de le moderniser et dynamiser de la sorte nos jeunes. Du côté des professionnels, cela faisait longtemps que l’idée d’un roman-photo nous trottait dans la tête. Du côté des adolescents, l’idée a vu le jour suite à la demande d’un adolescent de pouvoir créer une histoire sous forme de BD. Nous l’avons encouragé et assisté par la suite dans son projet, en recherchant le support adapté pour développer ses idées.
Les idées ont alors fusé, les mots se sont échangés et les dés ont été jetés. Manga, BD, fanzine, photos, Cloud et projet de longue durée seraient les maîtres-mots de notre futur projet.
Nous pouvons dire que ce projet s’est créé de façon spontanée par association d’idées, suite à des propositions, des rencontres et grâce à l’articulation des compétences de plusieurs professionnels.

Story-board de l’atelier

  • 2014 à 2015 : naissance et travail du groupe sur 2 projets

La création d’un roman-photo  : Quartier clos est une sorte de polar dont l’histoire (fortement inspirée par la série des experts) raconte l’enquête criminelle de deux inspecteurs. Ce roman-photo est destiné à l’ensemble des jeunes et professionnels de l’établissement. Affiché dans la salle polyvalente sous forme de fanzyne, il a connu un grand succès. Ce roman-photo est aussi apparu dans le book de fin d’année, malheureusement le jeune à l’origine de ce projet est parti cette année-là. Si Quartier clos n’a pu être terminé, il a donné une certaine appétence aux autres adolescents, ouvrant ainsi les portes de leur créativité.

La planche personnelle ou fanzine : la démarche est la même que pour le roman-photo mais sous forme de fanzine qui est une publication imprimée périodique ou non, créée et réalisée par des amateurs passionnés pour d'autres passionnés. Les consignes que nous avions fixées étaient de réaliser une planche contenant un maximum de 6 dessins illustrant un thème choisi personnellement. Chaque adolescent, une fois le thème trouvé, a fait des recherches pour savoir comment l’illustrer : Internet, livres, vidéo… Chaque étape du dessin a été numérisée et stockée dans un Cloud sécurisé (le principe de la clé USB étant dépassé pour ce genre de projet). La version finale a été intégrée dans la planche. Même si les jeunes avaient du mal à se représenter l’état final du projet, nous avons constaté au fil des séances que leur enthousiasme s’est accru.

  • 2015-2016 : l’âge de la maturité

Contrairement à l’an passé qui fut expérimental, notre projet d’atelier est mieux organisé et plus cadrant pour les jeunes, ce qui laisse davantage de place à la liberté créative. Tout au long de l’année, ils réfléchissent et travaillent sur le thème de leur choix tels que «  l’origine des mangas », « le tri sélectif » ou encore « la disparition des papillons » : autant de sujets diversifiés et uniques. Un long travail d’organisation se met alors en place avec des recherches sur Internet, (Wikipédia, photos…). Nous numérisons les dessins et les mettons en page avec un logiciel. En parallèle, les jeunes travaillent sur un sujet en commun « Qu’est-ce que l’IME? » afin de favoriser le travail d’équipe. C’est une définition vulgarisée de l’IME sous forme de planches BD, passant par la présentation des professionnels et des ateliers proposés. Ce book peut être utile aux jeunes arrivants pour mieux comprendre, de façon simplifiée, le fonctionnement de l’institution.

Le sens du travail en équipe : un objectif commun pour les jeunes comme pour les professionnels

De ce fait, les jeunes participant à l’atelier création numérique, sont pour la plupart également inscrits dans l’atelier création du mardi. Ils se consacrent ainsi à la production de dessins afin de nourrir leur planche personnelle ou leur thème. Seule la partie technique du dessin est travaillée dans cet atelier, où Aurélie G., une autre éducatrice spécialisée de l’IME, apporte des conseils graphiques aux adolescents et leur fait découvrir différentes matières de remplissage. La création numérique est une autre façon de travailler en équipe : chacun apporte ses compétences, son expérience, sa vision des choses, ses idées, son ressenti... La communication est essentielle même si le temps manque.

Un temps d’échange est nécessaire au début de chaque séance pour reprendre le fil du projet et réajuster les points de vue, afin de structurer la séance. Ainsi les jeunes prennent leurs repères, restent concentrés et motivés. C’est grâce à l'émergence de projets novateurs et originaux, que chacun peut apporter son petit coup de pinceau. C’est aussi l’occasion de travailler avec les acteurs des ateliers artistiques. Des liens sont aussi tissés avec d’autres ateliers notamment celui intitulé « CV et entretien ».

Focus sur le déroulement des séances

Nous avons commencé par réunir de l’information portant sur le matériel à utiliser ainsi que sur la façon d’aborder les thèmes. Une publication sur le roman-photo nous avait aiguillés sur les choix de contenus à fournir aux adolescents. Nous avons ainsi pu expliquer ce qu’était une bulle, le nombre de prises de vue mais aussi l’intérêt d’un story-board.

L’aspect technique : pour mener à bien ce projet, plusieurs problèmes devaient être réglés.

  • Conserver les traces des travaux numériques

Cela permet d’effectuer un retour sur les travaux déjà réalisés et de faire un point sur les réalisations en cours. Cela motive, par ailleurs, les ados sur leurs réalisations à venir en leur montrant l’évolution de leur projet. On peut enfin récupérer les œuvres qu’ils essaient parfois de faire disparaître.

  • Le stokage des images et des photos

Le nombre de fichiers, d’ordinateurs et d’utilisateurs connectés parfois en même temps ne nous permettait pas le partage de documents via une clef USB. Un des éducateurs spécialisés a pu mettre en place via son serveur personnel un Cloud sécurisé permettant d’échanger les fichiers.

  • Le droit à l’image

Nous nous sommes très vite confrontés au droit à l’image des adolescents qui, ne voulant pas être photographiés, contestaient. Nous avons pallié cette difficulté en cachant dans un premier temps leurs visages avec des masques. Nous avons aussi réalisé une autorisation au droit à l’image (reprise dans tous les ateliers). En dépit de cette autorisation signée, nous avons respecté le choix des adolescents quand certains se sentaient plus à l’aise en utilisant un masque neutre ou personnalisé. Au fil du temps, la confiance s’est installée entre nous : les jeunes ne se cachent plus derrière celui-ci et acceptent leur image.  

  • Les logiciels

Il n’y a rien de plus chronophage que le test de logiciels. Il fallait en trouver un facile, ergonomique, prenant en charge tout type de format et qui ne bug pas. Nous avons arrêté notre choix sur le logiciel Comic Life permettant de créer des BD à partir de photographies placées sur des planches dont les cases sont établies selon un grand nombre de modèles prédéfinis. Il est ensuite possible d’ajouter des bulles et des petits effets très comic. Au départ, nous nous sommes contentés de la version d’essai que nous avons, ensuite, achetée à la rentrée 2015.
Une très bonne connaissance de Photoshop et des outils multimédias est par ailleurs impérative sans quoi le temps de réalisation est multiplié par 10.

  • L’organisation du travail

Nous avons introduit Trello qui est un outil gratuit, permettant d’organiser son projet, simplement, en évitant des mails qui se perdent… On y fait figurer les planches, on peut effectuer des commentaires.

  • Le matériel utilisé

Dès les premières séances, nous nous sommes confrontés aux limites matérielles de l’IME : pas de pied pour l'appareil-photo, détourage des personnages sans logiciel, pas de Wifi pour faciliter la connexion. Avec le temps, grâce à la taxe d’apprentissage perçue par l'IME, nous avons pu faire l’acquisition de matériel facilitant ainsi notre travail.

D’autres projets ?

Dans un futur proche, nous avons l’ambition de proposer ce projet à d’autres établissements Cerep-Phymentin. Utopique? Non, tout est possible avec la mobilisation et les idées de chacun. En avant camarades !!!

Retrouvez aussi le site de Laurent Staelens, éducateur spécialisé à l'IME et webmaster.