Les aventuriers de la donnée perdue

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Conserver les travaux des adolescents

En 2013, l’atelier création numérique de l’IME Cerep-Phymentin conservait encore tous les travaux des adolescents sur le disque dur de l’ordinateur présent dans la salle. Petits et grands utilisaient également des clés USB pour transférer des données d’un poste à un autre. Mais un jour, l’ordinateur rendit l’âme avec tout son contenu… Retour sur une mésaventure vraisemblablement partagée par un certain nombre de professionnels et début de solution.

Moment de solitude

Quel ne fut pas notre désarroi face au néant des données perdues ! Comment expliquer alors aux adolescents que nous invitions sans cesse à effectuer un travail sur la durée et la constance, que nous avions perdu, en l’espace d’un instant, tout le travail réalisé avec eux, en l’occurrence les données de notre fameux roman-photo.

Il faut en parler : retour sur nos pratiques anciennes

Confortés par l’idée que la question de la sauvegarde régulière des données dépassait le cadre de l’IME et était bien un sujet d’importance mondiale !  - comme en témoigne d’ailleurs la journée mondiale de la sauvegarde informatique - ce petit accident fut l’occasion de parler de nos pratiques de sauvegarde de données entre professionnels et avec les jeunes.

C’est ainsi que pour l’atelier informatique, nous avions, au démarrage, distribué 7 clés USB pour y stocker les différents exercices de travail à faire avec les jeunes. Dès la troisième séance, plusieurs adolescents avaient oublié ou perdu leur clé USB, une autre ne fonctionnait déjà plus et la dernière était infectée par un virus. Cette expérience démontrait déjà l’importance de réfléchir aux supports de sauvegarde à utiliser. 

Mais Laurent, ça veut dire quoi une sauvegarde demande l’un des jeunes ?

Vous savez bien, la sauvegarde est un procédé qui consiste à faire des copies régulières sur un autre support au cas où les données originales seraient endommagées ou perdues. Il existe depuis longtemps bien des solutions mais qui ont évolué.

Dis, ça sert à quoi de sauvegarder les données ?

Si l’ordinateur que l’on utilise tous les jours est très performant pour stocker et accéder aux données, il n’est pas à l’abri de pannes matérielles ou peut attraper un virus en raison des échanges de données.

Alors on fait comment ?

Eh bien, nous avons 3 solutions :

  • la sauvegarde sur support amovible (clé USB ou disque dur externe) ;
  • la sauvegarde sur le serveur de l’établissement ; 
  • la sauvegarde sur un Cloud.

D’accord, mais comment savoir quelle sauvegarde utiliser pour quel fichier ? Bien, passons en revue les 3 possibilités.

Les clés USB

Dans la pratique, tout le monde connaît le support. C’est un périphérique de stockage que vous branchez sur n’importe quel ordinateur possédant un port USB. Très facile à transporter de par sa petite taille, elle peut contenir une grande quantité de documents à court terme.

Écoutez bien ! : les caractéristiques à prendre en compte dans le choix d’une clé USB sont la capacité (nombre d’octets de la clé) et la vitesse de transfert exprimée en Mo/s. Sur une clé USB, la durée de conservation des données est inférieure à 10 ans et le risque de perte de données est relativement élevé. Personnellement, je n’ai jamais réussi à garder une clé plus de 3 ans, durée que vous pouvez diviser à chaque nouvel utilisateur de cette même clé.

En pratique, lorsque vous, les jeunes, vous utilisez une clé, voici les questions que l’on peut se poser :  

  • S’en servira-t-il quotidiennement ou seulement une à deux fois par mois ?
  • Prendra-t-il le temps d’éjecter « proprement » sa clé avant de la débrancher ?
  • Attrapera-t-il un virus en téléchargeant un fichier ?
  • Branchera-t-il sa clé sur un port USB répondant parfaitement aux normes décrites par l’USB-IF *?
  • La perdra-t-il ?

* USB-IF : Ce que vous savez peut-être moins c’est qu’une norme existe pour les clés USB et que nous ne pouvons pas brancher n’importe quelle clef sur n’importe quel port (norme USB-IF).

Comment le savoir ? On ne peut pas ! Sinon de tester chaque port ou appeler le constructeur de l’ordinateur. Bref, si la clé USB reste irremplaçable pour le partage de fichiers ou le stockage temporaire, elle est déconseillée pour l'archivage de données en raison de sa fragilité. Même chose pour les cartes mémoire de type SD ou micro-SD, vous savez ? Celle que vous laissez dans l’appareil-photo !

On a comme deuxième solution le serveur local disponible dans l’établissement.

À l’IME, nous avons la possibilité de stocker nos données dans deux sortes de grandes boîtes virtuelles (appelées répertoires) sur ce que l’on appelle le serveur local. On a le Commun Professionnel accessible aux professionnels et le Commun accessible à tout le monde, y compris aux adolescents. C’est ainsi que l’on peut stocker au bon endroit des données, que l’on peut aussi partager avec les autres et sauvegarder. L’utilisation est extrêmement simple car le fameux répertoire ressemble à n’importe quel autre répertoire réseau de son ordinateur.

Attention, cela va devenir encore plus technique ! Soyez attentifs !

En réalité, ce que l’on appelle le serveur local requiert des compétences et une administration par un spécialiste.

En effet, le paramétrage vous permet différents droits :

  1. droit d’accéder à tout ou partie du réseau (de lui interdire le Commun, mais pas le Commun pro) ;
  2. droit d’accéder ou non au réseau depuis l’extérieur (soit par une connexion Internet extérieure) ;
  3. autorisation ou non d’installation de logiciels ;
  4. interdiction de certains sites Internet.

Du fait de la responsabilité juridique liée à la fourniture d’accès au réseau et à Internet ainsi qu’au caractère personnel de certaines données (Je vous rappelle, les jeunes, la charte informatique que vous avez signée.) :

  1. tout utilisateur doit être identifié et authentifié de façon unique avant d’accéder aux ressources ;
  2. toute tentative d’authentification sur le réseau doit être tracée par des logs.

Mais c’est quoi des logs ? Ça devient un peu compliqué tout ça !

Je sais bien mais si vous ne suivez pas les explications, vous allez continuer à stocker les données sur les clés USB !

Revenons aux logs ou journaux de connexions !

  • Les événements tracés sont enregistrés dans des journaux (ou logs) : ils répondent à des exigences légales.
  • Les connexions et déconnexions sont enregistrées, fournissant ainsi à l'administrateur l'adresse IP de la machine utilisée, le login de l'utilisateur, l'heure de l'établissement de la session, l'heure à laquelle la session s'est terminée et sa durée.
  • Il est donc possible de remonter à tout moment à la source d'un message, d'une consultation ou d'une action.
  • Les logs de connexion ne doivent pas être conservés plus de 6 mois (CNIL).

Pourquoi stocker sur le serveur local de l’IME ?

Sa capacité de stockage n’est pas comparable à celle d’une clé, car un serveur local peut contenir plusieurs disques durs. Ces serveurs disposent en outre d’outils de planification et de partage de données. La sécurité des données est très élevée (en raison de l’absence d’échanges avec l’extérieur) et la sauvegarde est sûre, car les disques durs du serveur sont en copie journalière.

Et ses inconvénients ?

Le coût d'acquisition est par contre beaucoup plus élevé que pour les clés USB et l’administration nécessite des connaissances en informatique. La procédure de sauvegarde est beaucoup plus lente sur un serveur que sur une clé en raison de la quantité de données à sauvegarder et du protocole de connexion utilisé. La sauvegarde des serveurs à l’IME se passe à 12h00, l’heure où tous les ados se connectent sur YouTube pour voir la dernière vidéo de Bouba. Il arrive souvent que la connexion finisse par casser pour cause d’embouteillage ! Le gros reproche que l’on pourrait faire à cette infrastructure est son manque de flexibilité (tous les environnements ne sont pas compatibles). Le réseau est fermé sur l’établissement, et pour chaque ordinateur que vous rajoutez, comme dernièrement les portables pour les tableaux numériques, il faut prévenir l’administrateur, qui est l’entreprise LIMPID-IT pour notre association.

C’est ainsi qu’on finit par avoir la tête dans les nuages : bienvenue dans le Cloud

Et voici notre troisième solution : le Cloud. Depuis le temps qu’on vous en parle… Il est au cœur de l’innovation digitale, il a pris une telle ampleur qu’aujourd’hui que vous l’utilisez sans même vous en rendre compte (Facebook, Google, You tube, …). Le cloud computing ou le stockage en nuage, mais qu’est-ce que c’est exactement ? Le Cloud computing (ou le « nuage » en français) est un mot à la mode, mais la technologie qui est utilisée depuis des décennies permet de délocaliser les données qui sont alors accessibles depuis Internet (c’est-à-dire sur des disques durs à distance). Cette solution donne aux utilisateurs la possibilité de consulter les données simultanément ou de les récupérer sur n’importe quel ordinateur, smartphone ou tablette tactile connectés à Internet. Ce système présente globalement les mêmes avantages que le réseau local de l’IME, tout en étant accessible via une connexion Internet. Parmi les logiciels Cloud connus, on peut citer Dropbox, Googledrive, Onedrive

Mais attention !

Même si le Cloud propose des services extrêmement utiles et complets, vous devez prendre connaissance de certaines réalités avant de mettre en ligne vos fichiers et données. « … Faire largement appel au cloud computing est la pire des stupidités. » - Richard Stallman, programmateur très connu. Tout d’abord, sauvegarder en ligne vos données avec un Cloud du type Dropbox crée une dépendance par rapport à l’entreprise qui propose ce service. En effet, si du jour au lendemain Google décide de fermer son service, vous n’aurez plus accès à vos documents. Par ailleurs, lisez bien les Conditions Générales d’Utilisation (CGU) du service de Cloud que vous comptez utiliser, surtout la partie concernant la propriété intellectuelle des documents déposés. Ainsi, il n’est pas rare de lire que les documents déposés en ligne ne vous appartiennent plus.

Laurent, on a bien un Cloud à l’IME ?

Oui, il s’appelle Owncloud. C’est une sorte de Dropbox maison mais qui est personnalisé. On n’est donc plus dépendants de Google par exemple.

Chaque utilisateur de notre Cloud possède un espace qui lui est alloué, par exemple pour celui de l’IME, j’ai alloué 5 Go par utilisateur, y compris pour les adolescents. Il n’y a que l’utilisateur et l’administrateur qui peuvent accéder à leurs données depuis Internet. C’est une fois connecté sur l’interface Web (ordinateur Mac/PC/linux, tablette, smartphone) que l’on décide de partager ou non ses données avec un groupe (réunion de plusieurs utilisateurs sur un sujet).

Le Cloud est aussi très flexible dans le partage de données y compris pour ceux que l’on invite ponctuellement. L’avantage certain est sa mobilité. On s’y connecte quel que soit son support et le lieu où l’on est et c’en est fini de la perte des données. Mais l’accès aux données professionnelles depuis tout support et à n’importe quelle heure entraîne une maîtrise plus difficile du temps de travail des salariés… Alors, maintenant les jeunes, passons à l’action pour arrêter d’éparpiller nos données et de les perdre à tout jamais !

Un nuage passe… puis vient le temps de vtaiment commencer à comparer les solutions.

  • Retrouvez aussi le site de Laurent Staelens, éducateur spécialisé à l'IME et webmaster.